Histoire
Είμαι ο Απόλλων
Hum ! Peut-être devrais-je m'exprimer dans votre langue moderne pour me faire comprendre de vous. Je suis le divin Apollon, dieu des arts, du chant, de la musique. Mais aussi celui de la beauté masculine, de la poésie ainsi que de la lumière. En plus d'être le conducteur des neuf muses, je suis également la déité des purifications et de la guérison. Comme si tout cela ne suffisait pas, je pratique également l'art de la divination et mes oracles sont dévoilées par les lèvres de ma servante la Pythie de Delphes.
Je suis venu au monde en des conditions assez particulières et je plains sincèrement Léto, ma tendre et adorable mère. Cela est déjà en soi une épreuve d'être une femme enceinte alors la difficulté ne peut être que double lorsque des jumeaux se développent en votre sein. Ma mère, au moment d'enfanter, fut contrainte de fuir à travers la Grèce, la malédiction d'Héra, lui interdisant d'accoucher sur terre ni en mer, car la lumière de l'astre solaire ne devait jamais briller sur le lieu où sa rivale mettrait ses enfants au monde. Poursuivie par l'ire d'une déesse cocufiée et par un serpent géant affamé de chair, elle fut conduite par Borée, le vent du Nord jusqu'à Poséidon. Ce dernier l’accueillit sur Délos, île errante sans la moindre attache avec la Terre, qu'il recouvrit sous les eaux afin de l'abriter des rayons du soleil. Je fus le second à porter mon regard sur le monde, ma sœur Artémis m'ayant précédée de quelques minutes. En cadeau de naissance, je reçu de la part de mon géniteur un char tiré par une dizaine de cygnes majestueux. Symbole de l'amour, de la grâce, de l'inspiration, de l'intuition et de la beauté. Il n'y avait vraiment que ce noble animal afin d'incarner tout ce qui me représentait en ce monde.
Ma tendre et si courageuse mère est l'être le plus chère à mon cœur autant que ma sœur, mon impétueuse jumelle véritable moitié de mon âme. Pour ces deux femmes, je suis prêt à tout, même à ôter la vie si je juge cela nécessaire. Python fut la première de mes victimes. Ne pouvant venger les souffrances endurées par ma mère par la faute de la puissante Héra, ce fut sur le serpent que ma rage se libéra. Parfois, Artémis se joignait à moi dans la vengeance comme ce fut le cas pour Tityos, ce demi-frère inconscient qui essaya de violenter notre mère. Ma fureur trouva un écho en la sienne quand cette sotte de Niobé se vanta devant qui voulait bien l’entendre de sa fécondité et de la beauté de ses enfants, dont la fierté mal placée lui fit faire l'erreur de se gausser de Léto, qui n’avait donné le jour qu’à une paire de jumeaux. En représailles, nous avons massacré de nos flèches sa précieuse progéniture sous son regard horrifié. Il faut avouer que je n'étais jamais à court d'idées lorsqu'il s'agissait de châtier une offense et je ne punissais jamais personne sans raison. Simplement, je n'avais guère besoin d'une bonne raison. N'avais-je pas écorché vivant le satyre Marsyas uniquement à cause de son talent musical et de l'ombrage frappant mon ego divin.
À l'instar de ma chère sœur, les liens sacrés du mariage engendrent en moi un sentiment d'antipathie... de répulsion. Je suis un célibataire endurci batifolant selon les inclinations de mes désirs physiques. Bien que j'éprouve de l'amour envers mes amants, ce n'est point de la manière dont vous appréhender ce concept. Il s'agit là uniquement d'un intérêt pour une source de plaisir. Tel un nouveau jouet entre les doigts d'un enfant, je me divertis en sa compagnie durant un temps. Puis, lorsque celle-ci perd tout intérêt pour ma personne, je m’empresse de la délaisser sans en éprouver le moindre signe de remords. Et bien que des rumeurs prétendent le contraire, je ne suis pas une déité jalouse. Je me qualifierais plutôt comme possessif envers ce que je considère comme mien. Coronis fit les frais de ce trait de caractère quand je découvris que cette traîtresse alors prégnante de ma divine personne, me trompait avec un vulgaire mortel. Elle périt sur le bûcher, le corps de son amant criblé de flèches à ses pieds. Pris de pitié pour l'enfant à naître, j'arrachai ce dernier du ventre de sa mère avant de le confier au centaure Chiron qui avait toute ma confiance pour l’élever. Jamais, je ne m'étais préoccupé de ma progéniture avant cela alors pourquoi déroger à mes habitudes pour celui-ci.
Contrairement à Artémis préférant la quiétude de la vie sauvage, j'ai toujours apprécié de me mêler à l'effervescence des cités humaines. Surtout, depuis que les mortels avaient adopté la plus célèbre des créations de Dionysos - le vin - et qu'ils s'enivraient jusqu'à se livrer à toutes sortes d'excès. L'alcool exacerbait leurs défauts et je prenais grand plaisir à profiter de ses vices d'ivrognes en leur compagnie. Un penchant qui provoqua ma perte au bout de quelques millénaires de bacchanales quotidiennes. A vrai dire, je ne suis toujours pas au fait des événements survenus durant cette soirée marquant un tournant important dans mon existence. Quelqu'un dont j'ignore encore aujourd'hui l'identité à réussi l'exploit cette nuit-là de dérober ma lyre, source de mes pouvoirs. Je suis depuis lors à la poursuite de ce puissant artefact, bridé d'une grande partie de ma magie divine et bloqué sous l'apparence d'un jeune homme d'une vingtaine d'année.
Mes errances ont conduit mes pas à travers tous les royaumes de la Forêt Enchantée et au-delà même du continent. Je n'ai pas renoncé pour autant à mes nombreux vices et mes conquêtes consentantes ou non, ont jalonné mon chemin. Certaines ne sont plus qu'un vague souvenir dans les méandres de ma mémoire, d'autres au contraire sont parvenues à se faire une place parmi mes souvenirs. Tel fut le cas de cette gitane ingénue, créature aux traits aussi exquis qu'exotiques et dont les charmes ont su faire réagir une partie de mon anatomie. Elle vibrait de cette énergie propre aux gens de son peuple, croquant la vie à pleines dents, opposée en tout à la terne demoiselle que je courtisais par intérêt envers la dot généreuse, dont son bourgeois de père l'avait si généreusement doté. Je n'ai pas hésité un instant à me jouer de sa tendre innocence afin d'obtenir ce que je souhaitais, la déflorant de cette dernière sans vergogne lors d'une nuit de passion, avant de finalement abandonner Esmeralda dès l'aube à son horrible destinée. Un siècle s'était écoulé depuis que je m'étais unis à Fleur-de-Lys de Gondelaurier et que son corps reposait depuis six pieds sous terre. Finalement, mes recherches me menèrent sur les traces d'un Ténébreux du nom de Rumplestiltskin et de la fameuse dague capable de le contrôler. En parvenant à mettre la main dessus, je tiendrais ma chance de recouvrer tout ce que j'avais perdu par le passé.
Des rumeurs me parvinrent, relayant qu'une ancienne connaissance avec qui j'avais tissé des liens d'amitié sous l'identité de Samuel, se trouvait être au service du Ténébreux depuis peu. Les grâces de Tyché semblaient m'être favorables de nouveau. Concoctant alors un stratagème dont l'élément essentiel était la compassion caractéristique de la jeune Belle, je favorisa dès lors une rencontre fortuite dans le village proche du château de ma cible. Inquiète de la nature de la blessure que je m'étais infligé à dessein à l'aide d'une arme magique, elle m'introduisit à l'intérieur de la demeure de Rumplestiltskin afin de me soustraire aux griffes de Thanatos. Belle conserva mon chevet durant bien des jours, changeant mes bandages sur ma jambe, m'offrant de l'eau, bavardant et parcourant ses nombreux livres à la recherche d'une solution. Lors d'une soirée durant laquelle le mage s'était absenté à l’extérieur, elle me surprit à roder à travers les étages, exigeant des explications. Ayant envisagé cette situation-là, je lui confia que son père m'avait engagé afin de la délivrer en incarcérant son geôlier dedans une boîte à musique enchantée. Je me figurais avoir réussi à la convaincre de m'assister dans mon entreprise, elle me trahit pourtant en faveur du pacte la liant à Rumplestiltskin. Comme celui-ci n'avait la liberté de me faire subir le moindre supplice physique ni m’ôter la vie ; bon courage à lui dans cette entreprise ; suite à une promesse faite à la jeune femme, il me fit endurer le châtiment dont je comptais l'infliger.
Piégé désormais à l’intérieur de cette boîte à musique, ma geôle d'ébène fut transportée à Neverland. Une île placée sous le joug tyrannique et d'espiègleries sanguinaires de Pan. La magie de sang partagée entre Père et Fils, permit à ce dernier de m'en extraire à la suite de quelques années de captivité. Quand bien même j'arborais une apparence adulte, ce morveux de Peter a néanmoins essayé de me séduire de ses vaines promesses, afin de me rallier à sa cause et de m'utiliser, Moi ! Une divinité, tel un vulgaire pion dans sa quête chimérique d'immortalité. N'ayant nul désir de mettre mon don prophétique ; certes énormément amoindri depuis la disparition de ma lyre ; à son service, il prit ombrage de mon refus et me contraignit par la force de ses pouvoirs à devenir le bourreau de ses sentences au sein de l'univers prison né de son esprit dérangé. Je ne nierais point avoir éprouvé plaisir à certaines exécutions d'enfants perdus ayant eut la déveine de déplaire à leur maître d'une quelconque manière. Le patronyme de Samuel devient très rapidement honnit parmi les ouailles de Pan. Van Pelt… le chasseur…, véritable croquemitaine réel de ces enfants perdus, séquestré dans le Jumanji. Ce nom d'emprunt étaient sur toutes leurs lèvres lorsque la lune prenait ses quartiers.
Aucun n'avait jamais réchappé à ma traque ! Jusqu'à ce beau jour où il se présenta à moi. Alan Parrish ! Plus dégourdi que les précédents, bien plus malin surtout. Je dois reconnaitre que j'avais perdu le plaisir de la chasse depuis quelque temps déjà et qu'il avait su raviver mon intérêt envers cette discipline. Au fil des ans, je me suis rendu compte qu'un lien s'était érigé entre moi et ce jeune garçon devenu à présent un homme. Mon désir de l'envoyer séjourner au pré de l’Asphodèle avait cédé le pas devant un autre. Ce gibier-là, je désirais toujours l'épingler à mon tableau de chasse. Simplement, ce n'était plus celui initial. Alan est cependant parvenu à s'échapper du Jumanji avec l'aide des orphelins Sheperd, me laissant en arrière. À la suite de ses évènements, Peter Pan ne m'a plus jamais envoyé d'autres proies. La solitude devint dès lors ma seule compagne. Le fusil qu'il m'avait accordé abandonné au fond d'un fleuve de la jungle. Samuel Van Pelt n'était plus, n'ayant plus de raison d'être.
Les parois de ce monde prison ont fini par s'éroder, contrecoup de la disparition de son créateur ainsi que de l'extinction de la magie du Pays Imaginaire. La brèche que j'ai empruntée pour recouvrer ma liberté m'a mené sur les rivages de l'île. Quel bonheur de fouler le sable chaud et de sentir la fraîche caresse du vent marin sur mon visage. Les jours se sont enchaînés, durant lesquels j'ai œuvré à découvrir la manière de quitter ces lieux. Me tenant bien à l'écart de la poignée d'enfants perdus ayant décidé de poursuivre leur vie à Neverland. Ce fut lors de l'un des rares échanges avec ces derniers, que j'ai appris l'existence de ce troc mis en place avec une bande de forbans venus d'une île située environ à une quinzaine de jours de voyage en mer. Je tenais là enfin la solution à mes problèmes et ce fut sous le nom de Phoebus de Châteaupers, que je me suis présenté à eux lorsqu'ils eurent à nouveau accosté dans les environs. J'ai négocié mon billet et j'ai pris le large en leur compagnie, en tant que nouveau membre de l'équipage de l'Octavius. N'oubliant pas d'abuser quelque peu de rhum durant le trajet.
Ce fut donc un tant soit peu éméché que j'ai posé les pieds à l'Ancrage du Refuge de Barbe-brume, il y a quelques semaines de cela. Jouissant des nombreux plaisirs offerts par les lieux depuis lors. Car après tout, on ne parvint jamais vraiment à chasser le naturel. Surtout, lorsqu'on ne le souhait pas.